TLASMIS (Tina)
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Introduction : Récit
de la Révolution Tlasmas |
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Une ombre noire dans les rues de Paris
; volant de toit en toit, elle se dirigea vers l’extérieur
de la mégalopole. La cité, au cours des millénaires,
avait enflé de façon démesurée, multipliant
son volume par vingt fois. Maintenant, l’ancienne capitale était
remplie de grattes ciel défiant les lois de la physique par leur
hauteurs vertigineuses. La seule sécurité pour leur stabilité
résidait dans les énormes poutres métalliques liant
les différents immeubles entre eux, formant une complexe citadin
très impressionnant et couvrant totalement les rues de toute lumière
naturelle ; mais, malgré cela, courir sur les toits restait très
périlleux voire insensé car toute chute était mortelle,
et l’écart entre les bâtiments devait bien faire dix
mètres. |
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– J’ai faim, grommela Torïn. |
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Gwenda regrettait sa proposition. Elle
la regrettait d’autant plus qu’il lui semblait, et au fur
et à mesure que le temps passait cette sensation se confirmait,
qu’elle lui avait été induite par Gunnm. |
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Un vaisseau apparut soudainement dans
l’espace ; quittant l’hyperespace, il continua son mouvement
en vitesse normale et se dirigea vers la planète devant lui. |
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Un poing passa de chaque côté
du visage de Gwenda. Oulah, ceux-ci ne sont pas passés loin, se
dit-elle. La Tlasmas était essoufflée. Depuis un quart d’heure,
elle tentait désespérément de frapper la femme-plante
et, depuis un quart d’heure, elle n’y arrivait pas. |
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Le feu venait de s’éteindre.
Roswill pointa un de ses trois doigts vers les bûches et un rayon
de flammes vint en allumer un nouveau. Torïn ronchonnait, grommelant
des sons inintelligibles tandis que Kao-Lan aiguisait sa lame sur une
pierre qu’il avait rapporté avec lui. |
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–
Alors ? Que fais-tu si loin de ta planète natale ? demanda Zora.
Je croyais que les Gersiennes étaient connectées à
leur Reine ? Gwenda hésita à répondre. Une larme coula sur sa joue lorsqu’elle repensa à sa douleur quand elle avait enlevé la glande qui la reliait à sa Mère. C’était comme si on lui avait retiré une partie d’elle, une partie de son âme. Comme si les plantes avaient une âme... – Qu’est-ce qui t’arrive Gersienne ? tu es toute pâle... – Pourrais-tu arrêter de m’appeler Gersienne Zora. Mon nom est Gwenda, je te l’ai pourtant dit. La Tlasmas regarda autour d’elle et leva les yeux au ciel, murmurant un mot que la Femme-Plante ne comprit pas. Puis elle revint vers elle et dit : – C’est très irrespectueux ici d’appeler quelqu’un par son nom. Seule la Reine et ses Championnes ont droit à cet honneur. – Mais comment faites-vous pour vous appeler entre vous ? – Nous utilisons notre titre. Tu peux m’appeler Guerrière, mais jamais Zora... Ce nom est réservé à ma famille. – Pourquoi me l’as-tu donné alors ? – C’était un signe de respect envers toi, et je suis honorée que tu m’ai donné le tien... – Très bien, alors tu pourras l’utiliser, car sur ma planète j’étais une des championnes de ma Reine, Mère-Guerrière et Apprentie Kalat. – Je t’appellerais donc Gwenda, Maître Gersienne. Au fait, tu n’as pas répondu à ma question. Que fais-tu ici ? – Je suis à la recherche de quelqu’un... Une Tlasmas. – Quel est son titre ? ou son nom ? peut être la connais-je... – Je ne sais pas comment elle se nomme, ni quel est son titre. Mais je crois bien l’avoir vue tout à l’heure... Elle se cachait dans l’ombre et lorsque je l’ai vue elle a disparu. C’est à ce moment que je te suis rentrée dedans... Une expression de peur passa sur le visage de Zora. Elle déglutit et répondit : – Elle se cachait dans les ombres ? – Oui... – Alors je crois connaître son titre... – Quel est-il ? – C’est une guerrière de l’Ombre, une tueuse, une fanatique... – Une Assassin ? De quel Caste ? – Quelle question étrange Gwenda ; je suis étonnée que tu connaisses l’existence des castes, mais puisque c’est le cas, tu devrais savoir que sur Tlasmis, une seule st présente : les Enfants du Soleil. – C’est un nom étrange pour des Assassins. – Les Enfants du Soleil sont très spéciaux. Ce sont des adorateurs de notre déesse : Aravim, fille du Soleil. Ce sont des radicaux qui croient tuer des pêcheurs pour le bien de tous. Mais leur notion dépêché est très large... – Sais-tu où je pourrais les trouver ? – Tu dois avoir une bonne raison pour vouloir chercher une de ces tueuses, mais je peux aisément te dire où la trouver. Tout le monde sait où elles se trouvent... – Et bien ? – Vas au Temple du Soleil. Ces Assassins sont des prêtresses. – Très bien. Je te remercie pour ton hospitalité... Guerrière... Mais je dois vraiment aller la chercher. – Laisse-moi te donner un conseil... – Oui, quel est-il ? – Fais très attention à toi Championne et, quand tu seras dans le Temple, regarde toujours derrière toi. |
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Le Temple du Soleil s’élevait
devant elle ; un grand Temple. Pas gigantesque, ni démesuré,
mais imposant, assez pour se détacher de toutes les autres maisons. Aucun garde devant les portes. Gwenda se dirigea vers les marches et monta jusqu’à la double porte de bois. Elle poussa un des deux battants ; celui-ci s’ouvrit sans aucune difficulté et la guerrière pénétra dans le bâtiment. Dans la pénombre de la salle éclairée par des torches, une tenture sur le mur du fond se détacha, grâce à la lumière qui la ciblait. Elle représentait un Soleil, supporté par un œil, qui envoyait ses rayons sur ses fidèles, petits points en bas de la pièce de tissu. La Gersienne avança prudemment vers le milieu de la salle et, se souvenant du conseil de Zora, elle jeta un regard derrière son épaule. Deux Tlasmas se cachaient dans l’ombre, l’observant... Elle se retourna soudainement, faisant face à ces deux ombres quand une lame se glissa sous sa gorge. Une sensation familière s’insinua dans son corps, remonta sa colonne et imposa une évidence à son esprit : c’était leur nouvelle compagne. – Ne t’avais-je pas dit de regarder derrière toi Championne ? |
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Une
forme se profila sur l’horizon de glace. C’était le
seul décor civilisé que l’ombre avait vu depuis deux
jours ; le premier point lui permettant de se rallier à quelque
chose de rationnel. Depuis qu’elle avait quitté son vaisseau,
elle n’avait vu que de la neige et des glaçons. Les grattes-ciel étaient encore loin, au moins cinquante kilomètres, mais elle s’en rapprochait et son tourment cessait enfin. L’ombre continua son chemin, une lueur d’espoir ravivant son énergie. Elle ne fit pas cent mètres qu’aussitôt elle s’arrêta. Elle se mit en position de défense et attendit... Deux secondes après, un grognement se fit entendre : en haut d’un petit renflement gelé, une bête apparut. Les Minsiens appelaient cet animal un Kri-Haï, ce qui pouvait se traduire par Dents de Sabre. C’était une créature assez féroce, inoffensive pour un centaure, mortelle pour un homme. L’animal aperçut l’ombre, elle poussa un hululement lugubre et, prenant appui sur ses pattes antérieures, fit un bond gigantesque pour se jeter sur sa proie. Celle-ci ne bougea pas d’un pouce et, alors que son adversaire arrivait sur elle, elle sauta et tourna à côté de lui, le tranchant en deux avec sa lame. Le Kri-Haï s’effondra par terre : son avant vers la gauche, son arrière vers la droite. L’ombre ratterit accroupie, la lame tendue vers la droite. Elle la rangea dans son fourreau dans un claquement bref. Puis, reprenant sa course, elle repartit vers la cité. |
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Zora ? Qu’est-ce que...? – Petite Championne, je t’avais dit de rester sur tes gardes, pas de te retourner... Tu n’écoutes pas les conseils d’un amie ? – Quelle amie ? Les deux Assassines près de la porte disparurent. Gwenda fit apparaître sa griffe sur son bras droit : – Si j’étais toi, je ne ferais pas ça Gwenda. Je suis assez bien entraînée pour te couper la gorge avant que tu ne tentes quoi que ce soit. – Ah oui ? La Gersienne leva sa main, aussitôt la Tlasmas actionna son arme ; celle-ci se brisa sur le cou de sa cible. Gwenda repoussa le bras de Zora et fit un saut vers la porte, puis elle se retourna. L’Assassine regarda son adversaire : une matière organique, la même que celle de la griffe, recouvrait la gorge de la Femme-Plante. Elle jeta son couteau derrière elle et sortit un épée massive, une lame crantée et acérée. – Qui es-tu vraiment ? demanda Gwenda. – Mon nom est Tina, je suis la maîtresse de cette pyramide, Grande Prêtresse de l’Ordre des Enfants du Soleil. Je suis également celle que tu cherches Championne. Aussitôt, la sensation familière envahit le corps de Gwenda, mais beaucoup plus fortement que les fois précédentes. Elle se ressaisit, reprit son souffle et lança : – Mais comment se fait-il que je ne t’ai pas reconnue plus tôt ? J’ai passé une grande partie de la nuit en ta compagnie. J’aurais dû ressentir ça... – Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, depuis que tu as rencontré tes compagnons, tu ne le ressens plus du tout à leur contact : ton corps a appris à s’habituer à eux. Moi j’ai appris à contrôler les signaux émis par mon corps. Tu m’as repérée hier dans la rue, aussitôt j’ai arrêté l’émission et j’ai joué une petite comédie : le personnage de Zora, pour te connaître un petit peu. – Mais, pourquoi ? – C’est une des premières règles de notre Caste : “Connais ton ennemi...” – Tu comptes m’assassiner ? Mais tu dois savoir qui je suis... Qui tu es... – Le Martien est venu, il m’a parlé de cette histoire de confrérie ; mais comme toi c’est un pêcheur, il paiera un jour. Gunnm, pensa Gwenda... Il est déjà venu... Que sait-il exactement ? Dès que je sortirais de là, il devra tout me dire, ou alors... – Très bien, annonça la Championne. C’est comme ça que tu vois les choses. Alors battons-nous... Tina sourit et se posta dans une garde offensive, un bras levé en arrière, le deuxième replié le long du corps, la lame à la main ; la jambe arrière fléchie et celle de devant tendue. Gwenda s’installa dans une pose défensive, le visage impassible : un bras devant elle, la jambe avant fléchie et celle de derrière tendue. un bouclier apparut sur son bras gauche. Les deux femmes s’observèrent quelques secondes... Soudain, Gwenda disparut ; elle réapparut instantanément sur la gauche de son adversaire qui para l’attaque de la griffe avec son épée. Répliquant immédiatement, Tina abattit sa lame sur la Gersienne qui mit son bouclier en travers, mais la Tlasmas, d’un revers, accrocha le bras gauche de la Femme-Plante et l’écarta, permettant à son poing d’atteindre le visage. La Championne partit en arrière, tourna sur elle-même et se rattrapa sur ses mains. Elle tendit son bras en avant et la matière organique s’allongea jusqu’à son ennemie, agrippant l’épée crantée. Chacune tira de son côté, tentant de faire flancher l’autre. Après quelques minutes, la Gersienne fut la plus forte et la lame partit vers elle, tandis que son bras reprenait des dimensions normales. Elle prit l’arme dans sa main gauche et la matière organique s’enroula autour de la garde. Tina eut une moue de dégoût et elle inspira. Une pointe osseuse sortit de sous son armure, entre l’avant-bras et la main. Elle se jeta sur son adversaire qui para avec sa nouvelle lame. Gwenda jeta ensuite son bras droit vers le visage de la Tlasmas qui évita, posant une main sur le sol et frappant de son pied la nuque. La Gersienne se cambra et passa sous la jambe ; s’aidant de ses membres supérieurs, elle fit un salto au sol et atteignit le menton de ses deux pieds, envoyant son adversaire se réceptionner quelques mètres plus loin... La géante sourit et Gwenda lui sourit en retour : – On dirait que ce combat n’est pas près de finir, dit-elle... |
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Bon allons-y, dit Gunnm. – Déjà ? répondit Torïn, mais je n’ai pas fini mon petit-déjeuner... – C’est ton troisième petit-déjeuner, lui lança Kao-Lan. – Et ? C’est tout de même un petit-déjeuner. Les quatre compagnons s’élancèrent sur le terrain accidenté de la banlieue Tlasmas. Torïn, un peu en arrière, finissait une cuisse d’un animal étrange qu’il avait chassé et cuit, tôt dans la matinée. Gunnm l’avait prévenu que cette bête n’était pas comestible, mais cela n’avait pas semblé déranger le Nohirrim qui avait répondu qu’il avait un système immunitaire très développé. La confrérie entra dans la ville. Ils sautèrent sur les toits et, se déplaçant extrêmement rapidement, ils atteignirent en quelques minutes le centre où se dressait la pyramide des Enfants du Soleil. Gunnm s’arrêta et enjoignit ses compagnons à faire de même. Il leur fit un signe et Kao-Lan disparut dans l’ombre d’une cheminée. Il réapparut moins d’une minute après, deux Tlasmas sous les bras, assommées et désarmées. – Elles nous attendaient dans une ruelle plus bas ; je pense qu’il y en a d’autres. Le Martien fit un nouveau signe et tous disparurent en un clin d’œil. Alors, il sauta dans la rue et marcha, d’un pas tranquille, vers l’entrée du Temple. |
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–
Tu es très forte Gersienne, dit la géante jaune. Pas une
seule de mes attaques n’est passée jusqu’ici.
– Ce n’est pas pour rien que le titre de Championne m’a été accordé. J’étais l’une des préférées de ma Reine. – Ta Mère t’a créée telle que tu es, n’est-ce pas ? Tu es née Championne... – Je me souviens de ma vie avant que ma Reine m’en ait accordé une nouvelle. – C’est impossible... personne n’a été capable de ramener les morts à la vie. – Mais... – Ce que ta Reine a fait, c’est te créer et t’insuffler, en guise de mémoire, les souvenirs qu’elle avait d’une de ses connaissances... – Non ! Je suis moi... – Depuis que tu t’es enfuie, ne crois-tu pas que tu as été remplacée ? – Aucune place ne doit être vacante, notre système en dépend. – Entends-toi parler. Tu es encore beaucoup plus liée à ta Mère que tu ne voudrais l’admettre. Si aucun place ne doit être libre, alors ta Reine a créé une de tes semblables ? Totalement nouvelle ? ou bien est-ce un clone de toi ? – Je... – Laisse-moi te montrer... Aussitôt, Tina, qui s’était approchée doucement de son adversaire tandis qu’elle lui parlait, lui agrippa la tête de ses deux mains et se concentra. Un blanc immense se fit dans la tête de Gwenda.
Soudain, elle se retrouva dans l’espace, voyageant plus rapidement
que la lumière elle-même. Autour d’elle, des étoiles
à perte de vue et, plus proche que tout les reste, le Soleil, Astre
flamboyant. Elle vit les planète se son système solaire
défiler devant elle : Solan, Mars, la Terre... Gers... Elle rouvrit les yeux. |
FIN
DU CHAPITRE |