NOHIRRIM (Torïn)
RETOUR

Introduction : Haut fait d’armes du plus grand des Rois Nohirrims : Balïn Ier.
Autrefois, les Nohirrims décidèrent de creuser dans la roche d’immenses forteresses qui deviendraient la fierté des générations futures. A cette époque, les Nohirrims étaient totalement séparés les uns des autres, et personne ne régnait sur tous. Le clan Balïn, en fouillant, tomba sur des galeries déjà existantes. Une équipée de guerriers partit explorer les salles gigantesques avec, à leur tête, le chef de famille, le patriarche : Balïn.
Pendant deux semaines, ils s’enfoncèrent au plus profond des galeries afin de découvrir qui en était la cause et ce fut à la fin de cette période qu’ils atteignirent enfin une énorme porte. Détournant l’Énergie Mystique qui l’enchaînait, ils réussirent à l’ouvrir et le Chaos entra sur la planète.
Afin de lutter contre ce fléau, le patriarche Balïn parcouru Nohirrim pour rallier à lui tous les clans. Il fut ainsi couronné Balïn Ier et choisi par l’Assemblée de tous les patriarches pour mener les Nohirrims au combat.
La guerre démarra et les petits hommes repoussèrent l’ennemi. Mais, alors que les troupes adverses se faisaient décimer, une immense créature fit son apparition sur le champ de bataille. À elle seule, elle massacra plus de la moitié du peuple Nohirrim.
Alors, Balïn Ier, n’écoutant que le courage de sa race devant une créature qui venait de tuer la moitié de son armée, chargea au travers des corps en poussant un cri de combat et l’atteignit, de sa hache, en plein ventre. Ce seul et unique coup terrassa le monstre...
Après la mort de l’ennemi, l’armée maléfique fut facilement mise en déroute et le calme revint sur la planète alors que les Nohirrims celui qui resterait dans les mémoires comme le premier et le meilleurs des Rois d’une longue lignée.

La salle du Conseil des patriarches était immense. Ce n’était pas en largeur qu’elle révélait toute sa majesté, car le cercle du sol n’était pas grand, mais elle montait à plus d’une centaine de mètres dans les airs, abritant la statue d’une taille phénoménale de Balïn Ier. Le dallage au dessous de la table dessinait une forme à quatre branches, symbole parfait Nohirrim. Disposés tout autour de la pièce, les sièges des patriarches avec celui du Roi, plus imposant et, à sa gauche, le Maître Longue Barbe.
– La Famille Gloïn demande au Roi de lui accorder l’exploitation de la mine Karad a Kazad, dit la patriarche d’un des plus grands clans marchands de la planète.
– Le Roi Kaïn Balïn accepte la proposition à la condition que cinquante pour cent des profits lui soient attribuées, lui répondit le Maître du Conseil, voix du Roi.
– Notre famille accepte la généreuse proposition du Roi...
Un seul Nohirrim ne faisait pas attention à ce qui était décidé dans la salle. Torïn, nouveau patriarche de la famille Torïn. Son père venait de mourir des suites d’un accident des plus étranges. Il devait alors régner sur son clan en portant dans son cœur et son esprit le poids de ses secrets. Mais même si il devait, de par sa fonction, assister aux conseils, il était totalement préoccupé par autre chose.
Récemment, une série de rêves, tous plus étranges les uns que les autres, perturbait ses nuits. Il avait alors décidé de se rendre au Mont Kapäz, fief des Thermo-Prêtres, sa nouvelle condition lui permettant de rencontrer le Grand Prêtre. Il voulait lui parler de ses songes...
Une voix le sortit des ses pensées :
– Je déclare cette session du conseil terminée ; à dans treize jours patriarches?
Balïn, le Maître Longue Barbe – et chef de la garde personnelle du Roi – venait de mettre fin à quatre heures de supplices pour Torïn.

La forteresse du Mont Kapäz, domaine de la Prêtrie Nohirrim, ordre des serviteurs du Dieu Grog, dieu d’Énergie et des boissons chaudes. Une immense montagne, creusée profondément, abritant des flux énergétiques extrêmement importants.
Torïn arriva enfin au sommet sommet de l’imposant escalier, après deux heures de montée haletante. Le portail, d’une taille démesurée – surtout pour un nain – lui faisait face. Deux énormes battants de chêne, importés de la Terre, cerclés par des runes de puissance. En haut des marches, deux piliers gigantesques avec, dessus, les statues des plus illustres Grands Prêtres ; à gauche, Durïn Balïn et, à droite, Norïn Balïn.
Deux Balïn, comme à la tête de tous les ordres dominants de la planète. Torïn ravala sa rancœur et avança en direction de la porte. Une faible lumière éclairait ses pas dans le nuit noire de Nohirrim. Il se dirigea vers le côté du battant droit et, tournant une rune, il découvrit un interrupteur. Il appuya dessus et, avec un grand bruit de grincement, de roues et de poulies, chaque partie du portail coulissa dans le mur.
Torïn continua son chemin et passa l’entrée, s’étonnant de l’épaisseur des murs ainsi que celle des portes. Il entra dans la forteresse et avança dans le hall d’entrée, dépassant les poteaux, les uns après les autres, observant les runes inscrites sur le sol. Enfin, il atteint le fond de la salle où, en haut de deux marches, trônait le Grand Prêtre : Raïm Balïn.
Le patriarche s’agenouilla, attendant que Raïm lui fasse signe de se relever :
– Que veux-tu, jeune chef de famille ?
– Je viens ici pour te demander de m’aider Grand Prêtre.
– Eh bien parle... Je t’écoute.
– Ces dernières nuits, des cauchemars sont venus troubler mon sommeil.
– Raconte-les moi...

Le voyage jusqu’à Kapäz était une très longue entreprise et, même lorsque l’on prévoyait d’y aller tôt dans la journée, le retour se faisait forcément avec une partie dans la nuit.
A la tombée du soleil, sur Nohirrim, les campagnes n’étaient plus très sûres ; en dehors des villes, de multiples espèces animales – appelés communément “démons” – plus ou moins dangereuses, rôdaient dans les différents décors qu’offraient la nature. Certaines des plus féroces n’hésitaient pas à s’attaquer aux convois et pèlerins ; les Nohirrims avaient donc, depuis longtemps, pris l’habitude de sortir de leurs cités l’arme au poing.
Torïn faisait depuis un certain temps ses voyages à pied. C’était, en fait, depuis qu’il avait fini son apprentissage de tueur de démon, dans lequel l’épreuve finale consistait à occire l’une des plus féroces créatures de la planète.
La main sur sa hache-laser, il marchait d’un pas rapide à travers une plaine nocturne... Soudain, il s’arrêta. Des voix lointaines se faisaient entendre. Tendant l’oreille en direction de ces lointains murmures il put identifier deux interlocuteurs. Un homme et une femme... Reprenant sa marche, il s’approcha du lieu de la discussion et, bientôt, il put voir la fumée d’un feu en plein ouest. Enfin, il arriva à quelques mètres du camp dressé à la hâte et, en effet, un homme et une femme se faisant face, séparés par le feu.

Torïn se réveilla d’un coup.
Il se demanda où il se trouvait. Regardant autour de lui, il vit une rue en pleine effervescence ; des Nohirrims se rendant aux forges, des gardes patrouillant et des marchands, vantant les mérites de leur commerce. Il se retourna et tomba nez à nez avec la porte du manoir de sa famille.
Comment était-il arrivé ici ?
Recherchant dans sa mémoire, il tenta de se remémorer les événements de la nuit dernière :

Quand il était arrivé à portée de vue et d’écoute des deux extranohirrims, il put enfin découvrir leur race. Étonnamment, ils ne venaient pas de la même planète. Le premier était humanoïde, certainement Martien, à cause de son corps cyborg ; et l’autre était indéniablement Gersienne. Les deux débattaient à propos d’une chose... Une personne... Une personne qui serait sur cette planète :
– Mais comment le retrouverons-nous ? demanda la femme-plante. Nous sommes sur la planète Nohirrim, elle est remplie de nohirrims. Pour moi, ils se ressemblent tous : jeunes, vieux, hommes, femmes...
Torïn sentit la colère monter en lui en entendant les paroles de la “jeune” femme, mais il se retint, entendant l’homme qui lui répondit :
– Ne sois pas ainsi Gwenda. Tu tombes dans le pur racisme et ce n’est pas du tout notre but... Nous chercherons ce Nohirrim et, si nous ne le trouvons pas, c’est lui qui nous trouvera...
– Ou elle...
C’est à ce moment-là que Torïn avait senti une sensation étrange. Une sorte de familiarité cachée s’installa dans son esprit, comme s’il connaissait cet étrange couple depuis longtemps.

C’était tout ce dont il se rappelait...
Le reste était totalement flou, mais cette sensation recommença à s’insinuer en lui, comme un virus. Secouant la tête, il se releva et tenta de penser à autre chose...
Le compte rendu du Conseil à sa famille !
Quelle heure était-il ?
Torïn leva les yeux vers le Soleil : treize heures... Il était en retard...

– Nous allons nous faire repérer ! Regarde notre taille, regarde la leur !
– Chut ! Calme-toi un peu Gwenda, dit Gunnm... Nous sommes ici dans un quartier de la capitale qui est ouvert aux habitants des autres planètes... Personne ne s’inquièteras de qui nous sommes et de ce que nous faisons ici.
– Mais si nous restons ici, nous ne le trouverons jamais ; il faudrait de la chance, beaucoup de chance, pour qu’il passe au même endroit que nous dans un quartier laissé aux rebuts nohirrims.
– C’est lui qui nous trouveras, je te l’ai déjà dit... Hier, lorsque nous discutions, il était là.
– Comment ? Mais pourquoi ne me l’as-tu pas dit ? Nous serions allé le voir !
– Mais il ne nous aurait pas écouté, il nous aurait peut être même attaqué. Souviens-toi de la façon dont tu as réagi... J’ai préféré le laisser entendre le but de notre mission ici... Le reste se fera tout seul...
– D’accord. Alors, nous attendons ici et il viendra lui même, d’une façon ou d’une autre... Je te fais confiance...
– C’est ainsi...
– Dis moi Gunnm...
– Mmmh ?
– Quel âge as-tu ?

Les Nohirrims étaient un peuple assez avancé technologiquement. La plupart d’entre eux travaillaient dans les forges. Les forges sont, ici, des sortes de centres de recherche où des Nohirrims expérimentent toutes sortes d’équipements, matériels qui ont été fabriqués quelques temps auparavant. Grâce à ces centres, prépondérants sur la planète, ce peuple était en constante avancée vers de nouvelles innovations.
Ils possédaient ainsi les meilleurs véhicules et équipements spatiaux et, leurs statioports étaient, près plusieurs siècles de mise au point, les mieux organisés du système solaire. C’étaient, en réalité, d’immenses tours surplombant la cité avec, sur tout le tour de leurs façades des plate-formes de tailles différentes – adaptées aux différents types de vaisseaux. Ces plate-formes étaient en fait équipées d’un module, inventé par les Nohirrims, qui attiraient les navires dans la phase finale de leur atterrissage et les posait délicatement sur le sol grâce à un module de stase. Bien entendu, une porte ouvrait l’intérieur d’un hangar pour les pilotes soucieux de ranger et protéger leur appareil des éventuelles intempéries.
Dans un des nombreux statioports de la capitales, une navette, Nohirrim apparemment, tentait un atterrissage sur une des plate-formes.
– Statioport à vaisseau en approche : déclinez votre identité et objet de mission. Vous n’êtes pas fichés !
Aucune réponse
– Je répète : statioport à vaisseau : qui êtes-vous ?
Toujours rien.
– Si vous ne répondez pas, nous nous verrons contraints d’ouvrir le feu...
En raison de la nouvelle absence de réponse, des tourelles sortirent de leur camouflage dans le mur de la tour-statioport, et se déployèrent, commençant à tirer sur le vaisseau qui repartit un peu plus loin pour ne pas être touché. Il évita habilement les tirs, l’un après l’autre jusqu’au dernier qui, enfin, sembla le toucher. Mais, au lieu de partir en flammes, il sembla s’effacer, disparaître, puis, sa forme changea et laissa apparaître un vaisseau individuel Martien.
Ce nouvel arrivant, abandonnant toute forme de passivité, manœuvra admirablement entre les tirs et les chasseurs de protection du statioport et commença à détruire les systèmes de défense, tourelles et attaquants, un par un.
Enfin, quand tout fut calme, il vint se poser sur la plate-forme qu’il visait au départ et plusieurs soldats Nohirrims commencèrent à se masser autour de lui. Tous en joue, ils attendirent le moment où le cockpit s’ouvrirait afin de mitrailler le pilote. Soudain, le vaisseau, par l’aération du moteur, relâcha de la vapeur, créant un nuage brumeux sur le petit îlot de métal. Tout se passa très vite ; tout à coup, un des gardes tomba à terre, la gorge ouverte. Tous les autres se retournèrent vers le cadavre et levèrent leurs armes... Rien. Ils se regardèrent, interloqués et, un autre Nohirrim s’effondra, mais, cette fois, tous purent le voir. Une ombre habillée d’une grande cape à capuche qui, d’un coup de sa lame, tranchait en deux son adversaire...
Puis, dans une danse endiablée, il tournoya, vola, fit jouer ses deux armes dans la brume répandue. Les gardes essayèrent de tirer sur ce démon... en vain. Il évita les balles, arracha les armes des mains de ses propriétaires et leur planta une épée entre les deux yeux.
Bientôt tous les petits hommes gisaient et, seul, un homme se tenait debout, tandis que la fumée commençait à se dissiper dans l’air.

Comme d’habitude, le compte-rendu du Conseil Nohirrim avait déplu à chaque membre de la famille Torïn. Mais ils n’avaient plus aucune influence sur la planète. Ici, tout n’était que richesse, et cette richesse, c’étaient les Balïn qui les possédaient... Aujourd’hui, ils n’y pouvaient rien. Ils avaient joué une grande partie avec eux et avaient perdu.
Malgré tout, il devait continuer à nourrir sa famille et devait travailler pour subvenir à leurs besoins. Ne possédant pas de véhicule terrestre, il devait se rendre dans sa forge seul, à pied et devait traverser toute la capitale pour atteindre les zones industrielles en périphérie.
Le trajet ne posait pas de problème, la circulation des villes Nohirrims était très bien organisée, et la sécurité assurée dans toute la ville... sauf dans le quartier noir, le seul ouvert aux étrangers à la planète. Ici, tous les trafics, jeux illégaux et délinquances étaient réunies dans ce petit noyau qui pourrissait d’année en année sans qu’aucun pouvoir n’y change quelque chose...
On y croisait toujours des hommes – voire humains – étranges et, aujourd’hui, Torïn tomba nez à... nombril avec un grand homme maigre enveloppé dans une cape à capuche noire. Il leva un moment les yeux vers lui, pour lui signifier qu’il devait s’excuser (tous les Nohirrims savaient pratiquer la persuasion d’autrui en toute mauvaise foi), mais le regard fixe et triste, mais coléreux et pathétique de cette homme l’empêcha d’ouvrir la bouche... Il lui présenta ses excuses et repartit s’effacer dans la foule.
Torïn resta un moment ébahi sur cette apparition mais, bien vite, il sembla disparaître de son esprit comme il avait disparu dans la masse grouillante... Alors, il reprit son chemin.
Gwenda se releva brusquement.
– Tu l’as senti aussi, dit Gunnm...
La Gersienne se retourna. Le Martien était assis dans un coin d’ombre de la pièce, seuls ses yeux semblaient luire, comme ceux d’un félin.
– Oui, répondit-elle. Deux forces. L’une phénoménale et l’autre très familière viennent de se rencontrer, mais elles se sont séparées presque immédiatement...
– La deuxième était celui que nous sommes venus chercher. La première...
– Quoi la première ?
– ...
– Réponds-moi !
Gunnm prit ses affaires : sa lame et son manteau, et sortit de la pièce?
– Suis-moi, cria-t-il à Gwenda. Nous devons le rattraper.
– Tu avais promis de ne plus faire aucun secret, répondit Gwenda en se précipitant à sa suite.
Torïn arriva enfin à sa forge. C’était un complexe très moderne enterré sous une petite colline creusée. Une énorme cheminée laissait échapper des volutes de fumée. Le jeune patriarche était, de par sa position, chef de recherche et des travaux et, tous les guerriers des forges travaillant ici appartenaient, de près ou de loin, à sa famille.
Mais Torïn ne gagnait as seulement sa vie ainsi. Il était également tueur de démons, en plus d’intégrer l’armée Nohirrim, il tuait les créatures lorsqu’elles menaçait la cité et la vie de la population. La famille Torïn était autrefois très populaire et, à chaque fois, la ville s’octroyait leurs services. Mais là, encore une fois, comme partout ailleurs, la famille Balïn était devenue hégémonique.
Alors qu’il était à cent mètres de l’entrée, il leva les yeux de son chemin et, une deuxième fois dans la journée, rencontra le regard d’un humain...
– Qui êtes-vous ? lui demanda-t-il sans prendre la peine de savoir qui il était.
– Tu sais qui je suis Nohirrim, parce que tu m’as toujours connu et, parce que tu m’as vu hier soir...
Torïn, surpris, regarda son interlocuteur. C’était bien l’homme d’hier, celui qui discutait avec une femme autour d’un feu.
– Ecoute-nous Nohirrim, dit une vois féminine derrière Torïn. Nous ne te voulons aucun mal.
Le patriarche se retourna. C’était bien la compagne de l’homme : une Gersienne et un humain... Quelle dérision... Même si sa famille n’avait plus aucun renom sur la planète, elle gardait tout de même sa fierté. Si ils tentaient quoi que ce soit, il ne se laisserait pas faire...
– Que me voulez-vous étrangers ? Vous n’avez pas le droit de rester ici !
– Nous devons discuter dit l’homme.
– Je n’aurais de discussion avec aucun d’entre vous.
– Il semblerait qu’il n’ait pas encore réalisé, lança la Gersienne à son compagnon.
– Tu étais pareille au début... et peut être même encore aujourd’hui...
– Ecartez-vous, cria Torïn ! Laissez moi passer sinon je vous promets sur l’honneur de la famille Torïn que vous le regretterez...
– Très bien, répondit l’homme.
Il commença à s’écarter :
– Mais réfléchis bien... Torïn, continua-t-il. Regarde au fond de toi, et vois qui nous sommes...
– Qu’est-ce que..??
– Pas mal ton discours Gunnm.
Tous se retournèrent vers la forge. Au dessus de l’énorme ouverture au sommet de la colline, qui lâchait des tonnes de fumée, se tenait un homme habillé d’une cape noire, la capuche baissée, les cheveux longs et bruns lâchés et le torse nu.
Xian, murmura Gunnm.
– C’est l’homme que j’ai rencontré ce matin, dit Torïn.
– C’est bien sa puissance que j’ai senti, continua Gwenda. Qui est-il Gunnm ?
– Xian est un de mes maîtres. Sur Mars, il enseigne l’art de tuer aux plus talentueux de nos guerriers qui deviennent des chasseurs... des Assassins.
– Belle description, répondit l’intéressé en redescendant de sa position. Je penses que tu sais pourquoi je suis ici.
– Pur m’exécuter, très certainement.
– Pour... commença Gwenda, frappée de stupeur. Qu’as-tu fait ?
– Notre Empereur est contrôlé par l’acteur principal du Changement dont nous sommes victimes. J’ai été désavoué, emprisonné ; mais j’ai réussi à m’échapper pour venir vous chercher...
Xian ! Tu as dû le voir, comme moi, ce n’est plus Milms... Quelque chose est derrière lui.
– Ce n’est pas mon problème. Je sers mon dirigeant, quel qu’il soit ; et tu devrais en faire
autant... en tant qu’Assassin de la Nuit...
– Je dois avant tout servir ma planète... et ce n’est pas ce que tu fais...
– Cette discussion ne servira à rien. Tu as ton point de vue, j’ai le mien. Nous sommes aussi entêtés l’un que l’autre. Rien ne changera...
– Au contraire... Tout change, mais il est encore temps de l’arrêter. Voyons si l’élève a
dépassé le maître.
– Ecoute-moi bien Nohirrim, dit Gwenda à Torïn alors qu’ils repartaient vers la ville en courant. Je sais bien que son histoire a l’air folle... Il m’a raconté la même après être venu sur ma planète...
– Tu ne vas pas aider ton compagnon, demanda Torïn.
– Il m’a demandé de le laisser tranquille et d’aller chercher un moyen de locomotion pour quitter ta planète.
– Je ne l’ai pourtant pas entendu... Arrête-toi Gersienne !
Les deux étranges compagnons stoppèrent leur course effrénée :
– Un message télépathique ? Les Martiens ne savent pas utiliser cette technique, ou bien au court d’un certain nombre d’années. Qui est-il ?
– Je n’en sais pas plus que toi... Il s’appelle Gunnm et est Martien. Laisse-moi terminer !
– Tu as deux minutes...
– Je l’ai vu, de mes propres yeux...
– Quoi ? demanda Torïn, piqué par la curiosité.
– Ce changement dans la Galaxie, ou peut être dans l’Univers entier.
– Mais de quoi parles-tu ?
– La technologie. Elle corrompe tout, rien ne lui résiste. Même sur ma planète, entièrement végétale. J’ai vu ma Rein... Ce n’était plus qu’une machine, vivante peut être, mais pas ma Mère...
Un silence s’installa. Gwenda ne put retenir une larme qui coula sur sa joue et vint tomber sur le doigt de Torïn :
– Tu dis que ta Reine, maîtresse de la Nature, a été entièrement corrompue. Mais que va-t-il advenir de ma planète, nous sommes un des peuples les plus avancés technologiquement.
– C’est justement ce pour quoi Gunnm traverse la Galaxie. Il nous cherche.
– Mais comment peut-il savoir ?
– Parce que nous l’attendons. Souviens-toi de ce qu’il t’a dit. Regarde au fond de toi, cherche cette familiarité quand tu nous parles, quand tu nous vois...
Il ne se bat pas seulement pour lui – pour sauver sa vie – mais aussi pour nous...
Les deux hommes ne bougeaient pas. Ils se regardaient droit dans les yeux, chacun jaugeait la puissance et l’expérience de l’autre...
– Voyons où tu en es maintenant, murmura l’homme aux cheveux longs.
En disant cela, il leva les deux bras en avant, se souleva du sol de quelques décimètres et une boule d’énergie se forma devant lui. Elle prit une teinte rouge et commença à s’entourer de plasma. D’un cri, il la projeta vers son adversaire. Gunnm ne bougea pas devant l’arrivée de cette attaque mais, juste au dernier moment, il tendit son bras et, d’un mot, il absorba la boule crépitante dans sa
main.
Levant les yeux, il ne vit pas Xian. Un mouvement derrière lui le fit réagir et il sortit sa lame d’un mouvement imperceptible, parant les deux poignards du Maître Assassin ; puis, d’un revers, il dégagea son katana et asséna un coup à son adversaire qui l’évita d’un bond en arrière. Il repartit, prenant appui sur le sol, droit sur Gunnm qui ne put éviter le coup de poing. Mais, surmontant la douleur de la puissance de son maître, il lui attrapa le bras. Tombant sur le dos, il roula et l’envoya voler vers la forge.
Xian se rétablit néanmoins ; il leva son poing devant son visage et murmura quelques mots. Aussitôt, une sorte de plasma rouge-sang entoura son membre. Tendant deux doigts, il projeta un long rayon vers son élève. Celui-ci se lança en flottant au dessus du sol à pleine vitesse, tandis que le plasma arrivait vers lui ; il cria et une bulle l’enveloppa, détournant le rayon. Il continua son vol, droit sur Xian, et lui asséna un uppercut suivi de coups de poings dans les côtes à une vitesse ahurissante.
Son adversaire subit les coups sans broncher puis, d’un coup, il bloqua les deux poings de son assaillant. Celui-ci réussit néanmoins à en dégager un et, tendant son bras en arrière prépara un coup unique mais très puissant. D’un bond, il évita la main de Gunnm qui vint s’encastrer dans la roche d’au moins quinze centimètres.
Effectuant un salto en l’air, Xian retomba sur les épaules du cyborg et, se laissant tomber en arrière, l’envoya dans les airs. Celui-ci se stoppa en écartant les bras et les jambes...
Le Maître regarda son disciple droit dans les yeux :
– Pas mal, dit-il avec un sourire. Il est vrai que tu t’es amélioré.
– Désolé, je n’ai pas le temps e jouer. Mais je n’ai également aucun moyen de te persuader Xian. Pardonne-moi...
– Comment ?
Gunnm baissa les deux bras et chuchota quelques mots incompréhensibles :
– Xfghrtz Rhzgbnmmm...
Deux boules d’énergie bleues apparurent dans ses mains et grossirent rapidement ; et, d’un coup, il cria un unique mot et ses créations furent aspirées dans son corps qui commença à prendre une lueur bleutée. Gunnm resta les yeux fermés quelques secondes qui parurent un éternité à Xian, tandis que des éclairs d’énergie parcouraient le corps de l’ancien agent.
Soudain, ouvrant les yeux, il fonça vers son adversaire à une vitesse prodigieuse. Son maître n’eut pas le temps d’analyser l’attaque. Il reçut son adversaire de plein fouet. Profitant du déséquilibre de Xian, Gunnm se ramassa sur lui-même et, dans une courbe gracieuse, lui décocha un coup de pied circulaire au visage ; mais, l’instant d’après, il fut derrière l’Assassin et posa ses mains sur son torse et prononça deux mots :
– Arzhg Mzrrog !
De l’énergie, sortant de ses mains, brilla quelques instants puis repoussa Xian vers la colline de la forge. Il s’enfonça de quarante centimètres dans le mur. Crachant du sang, il retomba sur le sol. Il sentit une lame se glisser sous sa gorge et releva la tête...
– Désolé Xian...
– Où as-tu acquis une telle puissance ? demanda le Maître. Tu ne l’avais pas.
– Si, mais à quoi m’aurait-elle servie ? Tu comprendras que je ne peux ni t’emmener avec moi, ni te tuer... Je n’ai aucune raison suffisante...
– Fais ce que tu veux. De toutes façons, je ne pourrais pas t’arrêter.
– Bien...
– Mais qu’est-ce qu’il fait ? se demanda Gwenda, parlant tout haut. S’il ne vient pas, tout est foutu...
– Il va bien arriver. Si il est aussi puissant que tu le dis, il n’aura aucun mal à le vaincre.
Gwenda et Torïn étaient à bord du vaisseau de la famille du Nohirrim ; une vieille carcasse, mais suffisamment rapide pour voyager dans l’espace sans dommage. Un vieux coucou, ancien d’une vingtaine d’année et qui n’avait pas été révisé depuis lors. Plusieurs plaques de la carrosserie avaient été retirée pour servir autre part et le reservoir, percé, avait dû être réparé en vitesse.
Ils avaient démarré l’appareil mais, bien vite, ils ne pourraient plus se permettre d’attendre leur compagnon. Enfin, Gunnm apparut et se dépêcha d’entrer dans le cockpit afin de prendre les commandes...
– Où allons-nous ? demanda Torïn.
– Le Troisième sera la Nuit.
– Pardon ?
– Allons sur Laoh-Gin...
FIN DU CHAPITRE

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